Villefranche-sur-mer

Villefranche-sur-Mer

Villefranche-sur-Mer est une agréable petite ville méditerranéenne dans le Sud-Est de la France, s’étirant le long de la baie située entre le mont Boron et la presqu’île du cap Ferrat. Ce coin de mer tranquille est l’un des plus beaux de la Côte d’Azur.

« Quand je regarde Villefranche, je vois ma jeunesse ! » disait Jean Cocteau. Mais en quoi cette petite ville  captivait-elle donc tant le célèbre écrivain, dramaturge et metteur en scène ? Certainement son atmosphère inimitable rendant léger, joyeux, et entraînante comme si elle invitait à la danse. Quand vous arrivez ici, la tête vous tourne de bonheur et vous avez l’impression que la vie ne fait que commencer ! Le nom même de Villefranche sous-entend « ville libre », Charles II d’Anjou l’ayant fondée à la fin du XIIIe siècle à la place d’un antique port romain, créa ici un territoire commercial hors taxe, à l’image du duty free de nos jours. En 1388 la ville passa sous le contrôle de la dynastie des Savoie et emprunta son nom à la manière italienne : Villafranka. Au milieu du XVIe siècle, le duc  Emmanuel-Philibert, comprenant la portée stratégique de la baie dans laquelle se trouvait Villefranche, décida de l’utiliser pour créer un port militaire. Tous avaient encore en tête la désagréable visite de la flottille du sultan turc en 1543.

Le fort du Mont Alban fut construit sur ordre du duc sur la colline entre Nice et Villefranche, et à l’entrée de la baie la forteresse pittoresque ou citadelle Saint-Elme fut construite, dans laquelle la municipalité a aujourd’hui établi ses quartiers, il y a également un musé (la galerie des toiles du musée comprend des travaux de grands maîtres tels que Picasso, Picabia, Miro ainsi que d’éminents artistes russes : Repine, Polenov, Levitan), un cinéma et une salle de concert à ciel ouvert. La petite église de Saint-Pierre attire également l’œil. Il s’agit d’une chapelle du Moyen-Âge construite dans le style roman au XVIe siècle. En 1957 ses murs ont été peints par ce même célèbre Jean Cocteau qui, outre son talent littéraire, avait un remarquable goût artistique, il dédia la principale partie de croquis originaux sur le thème de la vie du Saint-Apôtre. La chapelle a pour certaines raisons vraisemblablement fortement marqué le grand maître : dans l’une de ses œuvres, Jean Cocteau racontera qu’elle « faisait des clins d’œil conspirateurs avec ses candélabres qui semblaient tout droit sortis de l’apocalypse ».

Durant plusieurs centaines d’années Villefranche-sur-Mer resta le principal port de tout le royaume de Sardaigne jusqu’à la fin du XVIIIe siècle lorsque fut construit le grand port de Nice.

La vie de la ville se révéla étroitement liée à la Russie et aux Russes. Les premiers Russes sont arrivés ici en nombre en 1770 lorsque que l’escadre sous le commandement d’Alekseï Orlov  jeta l’ancre dans la baie de Villefranche. Cet évènement a été récemment immortalisé par un monument assez grossier : les bustes des deux frères Orlov et de l’amiral Ouchkov. Mais la véritable expansion des Russes sur la Côte d’Azur a commencé dans la seconde moitié du XIXe siècle, et c’est précisément Villefranche qui devint le centre de la colonie russe. La veuve de Nicolas Ier s’établit d’abord en 1856 à Nice, mais emménagea rapidement avec ses demoiselles d’honneur et sa cour à Villefranche où elle passera près de six mois.

La confortable route depuis Nice jusqu’à Villefranche fut justement construite en grande partie grâce aux fonds de l’impératrice douairière Alexandra Feodorovna et en pris alors le nom. Après la Seconde Guerre Mondiale les mairies communistes essayèrent d’effacer ce fait de la mémoire collective et des cartes en renommant le boulevard de l’Impératrice  en boulevard de Stalingrad, mais aujourd’hui, les habitants reconnaissants de Villefranche ont nommé, en l’honneur d’alexandra Feodorovna, un petit quai dans le centre même de la ville et il y a quelques années un buste de Sa Majesté fut installé juste à côté de la citadelle. Au final, les sculptures de l’impératrice et des amiraux disposées les uns en face des autres constituent en quelque sorte un mémorial russe de Villefranche.

La veuve de Nicolas Ier  ne se souciait non seulement de la bonne qualité de ses propres vacances et du confort des habitants, nos impératrices, même après être descendues du trône, continuaient à protéger les intérêts géopolitiques russes. Alexandra Feodorovna joignit l’agréable pour elle à l’utile pour la Russie. Après la très désavantageuse issue de la guerre de Crimée, l’empire, selon les conditions d’un accord de paix, se vit priver du droit de passage de sa flotte de la mer Noire vers la mer Méditerranée via le détroit du Bosphore et des Dardanelles. « Il faut faire quelque chose ! » s’écria Alexandre II, et il envoya sa propre mère réparer les erreurs de son père. L’entourage de l’impératrice acheta rapidement  des biens immobiliers autour des eaux de Villefranche-sur-Mer et dès 1857 un contrat de location de la baie fut signé avec le royaume de Sardaigne dans les conditions duquel,  sur la rade d’une longueur de 2 km, d’une largeur d’1 km et d’une profondeur de 25 à 150 mètres, la flotte militaire russe « s’est enregistrée». Après le transfert de ces terres vers la France en 1860, la légitimité du contrat fut confirmée par l’empereur Napoléon III. La location de la baie par les russes se prolongea jusqu’en 1878, après quoi une station zoologique financée depuis Saint-Pétersbourg fut installée dans les locaux de l’ancienne base maritime militaire russe. Même après la chute de l’empire russe, les directeurs de cette station passée sous contrôle de l’administration française, restèrent encore pendant un demi-siècle des chercheurs russes. Mais l’importance stratégique de la rade de Villefranche est soulignée par le fait qu’après la Seconde Guerre Mondiale une escadre américaine s’y établit en 1962, aujourd’hui de nombreux navires de guerres français y mouillent, pittoresquement mêlés aux embarcations de pêcheurs panachées.

Mais la construction la plus célèbre de Villefranche-sur-Mer est celle que l’on appelle « la Villa du roi Léopold » (elle est située à l’entrée du cap Ferrat). Le monarque belge qui aimait  la Riviera  fit beaucoup pour son aménagement. En 1902 Léopold II acquit une parcelle de terrain à Villefranche sur laquelle il décida de faire construire une villa pour sa favorite, la jeune Française Blanche Delacroix qui lui donna ensuite deux fils illégitimes. Le mariage morganatique entre elle et le roi de 74 ans eut lieu en 1909, cinq ans avant sa mort. La villa n’était alors pas terminée. Dans les années 1930, elle fut significativement agrandie par le nouveau propriétaire : le millionnaire américain Ogden Codman et demeure jusqu’à présent la plus grande de la ville. En 1955 Alfred Hitchcock y tourna son film policier ironique La main au collet avec Cary Grant et Grace Kelly dans les rôles principaux. Dans les années 1970 la villa fut rachetée par le milliardaire français d’origine libanaise Edmond Safra qui y construisit même un abris en cas de guerre nucléaire. Le milliardaire a reçu dans sa villa le président des États-Unis Ronald Reagan, Franck Sinatra, le prince Charles et le prince Rainier III. Mentionner la villa à la liste des curiosités touristiques ne serait pas exact : il s’agit bien sûr d’une propriété privée, fermée aux touristes.